Nouvelle expérience en pédagogie documentaire : le Bib’Truck

Dans le cadre d’une unité d’enseignement programmée en première année de licence d’économie et d’AES (Administration économique et sociale) au sein de l’université de Bordeaux, les étudiants doivent réaliser une revue de presse (notée bien sûr !).

Afin de les aider dans cette épreuve, le service des formations documentaires de la bibliothèque universitaire de droit, science politique, économie, a expérimenté un nouveau dispositif d’accompagnement pédagogique : le Bib’Truck !

Le Bib’Truck est un superbe caddie orange monté sur deux roues conduit par trois professionnelles de la recherche documentaire : Isabelle Anton-Alvarez, Virginie Bloqué, Samia Cahuzac

Au menu : tablettes numériques, supports pédagogiques et des conseils par kilos !

Informés directement sur la plateforme pédagogique Moodle, les étudiants ont retrouvé le Bib’Truck stationné à côté de la cafeteria Le Forum à l’heure du déjeuner. L’expérience a eu lieu à quatre reprises et le bilan est positif.

 

Pour en savoir plus, nous sommes allés interroger les protagonistes et animatrices :

 

Comment vous est venue l’idée du Bib’Truck ?

Samia : depuis deux ans, nous avons vu émerger sur l’esplanade des Antilles du campus de Pessac un service de food truck, on s’est dit alors pourquoi pas un Bib’truck ! Nous avons détourné ce concept et substitué au truck de la restauration, un caddie estampillé bibliothèque qui vient apporter une information ciblée aux étudiants.

Isabelle : il faut dire que nous avons pris l’habitude depuis quelques années de nous balader avec un caddie que j’appelle le « caddie de vieille » qui nous sert lorsque nous intervenons pour des formations à destinations des étudiants.

Mais le point de départ ce n’est pas spécialement le food truck c’est surtout le besoin d’un nouveau concept. À l’origine il y a les ateliers de formation documentaires à la BU. Ce sont des ateliers programmés (certains jours, certaines heures et avec inscription) mais les étudiants n’y venaient pas parce que nous n’avions pas forcément le bon timing. Nous nous sommes dit que le moment où les étudiants sont réceptifs et ne font rien c’est pendant leur pause déjeuner. Donc l’idée du caddie ajoutée à celle du food truck avec l’objectif d’aller à la rencontre des étudiants ça a donné le Bib ‘truck !

 

Dans ce cas pourquoi ne pas programmer les ateliers de la BU à la pause déjeuner ?

Virginie : les ateliers de la BU sont sur inscription, sur le mode du volontariat, donc beaucoup d’étudiants n’osent pas s’inscrire. Avec le Bib’truck c’est la bibliothèque qui vient à eux du coup la prise de parole se fait plus facilement.

Isabelle : Le Bib’truck est une première approche. Notre objectif avec ce concept est aussi de promouvoir les ateliers et ça a plutôt bien marché car les retombées ont été immédiates : plus d’une cinquantaine d’inscrits sur les derniers ateliers proposés .

Samia : j’ajouterai que le bib truck, en plus d’être un dispositif pédagogique, est un dispositif de médiation : médiation par rapport à un cours en ligne, avec un certain nombre de questionnement sur ce dernier, et médiation par rapport à la promotion des ateliers.

 

Les étudiants ont-ils répondu présent et comment le service a été reçu ?

Isabelle, Samia et Virginie : Oui ! (un grand oui sorti du cœur)

Isabelle : le Bib’truck était annoncé via le forum de l’espace de cours en ligne obligatoire pour les L1 économie et AES et dès le premier jour ils étaient présents pour nous poser des questions sur le travail qu’ils devaient déposer à savoir la revue de presse.

Au total, il y a eu quatre séances. La dernière s’est déroulée le jeudi 28 mars et elle était dédiée à l’évaluation (autre dispositif innovant mis en place sur la plateforme moodle et qui consiste en une évaluation par les pairs). Il y a également eu beaucoup de monde.

Comme je le disais précédemment, le succès des Bib’truck s’est traduit par plus d’inscriptions aux ateliers et indirectement a impacté le nombre de devoirs restitués sur la plateforme pédagogique moodle : 632 copies ont été déposées, ce qui est énorme !

Nous pouvons  d’ores et déjà  dire que ce service a été bien reçu du moins qu’il a  répondu à leurs attentes et a désamorcé leurs inquiétudes sachant que le devoir restitué est noté et que les étudiants veulent avoir toutes les chances de réussir.

Virginie : pour le premier Bib’truck  les étudiants sont venus en nombre car ils avaient des questions à la fois sur l’utilisation de la plateforme moodle,  mais également sur les consignes de l’exercice , et les sujets . Ils étaient rassurés de voir qu’on était là pour eux. C’est même allé plus loin car des étudiants sont venus avec leurs sujets réalisés pour obtenir  un avis ou une pré -correction avant de les déposer.

Samia : l’expérience du Bib’truck a également permis aux bibliothécaires d’être repérés car nous avons été vus dans un autre cadre, un autre contexte. Ils nous aborderont peut-être plus facilement dorénavant. En cassant l’image institutionnelle de la bibliothèque on agit sur un autre type de relation que l’on noue avec les étudiants. Ils viennent nous voir, nous questionner car il n’y a plus de barrière et de distance.

 

Est-ce que les étudiants ont profité du Bib’Truck pour faire appel à vous sur d’autres sujets liés aux bibliothèques ?

Virginie : les questions portaient essentiellement sur le travail qu’ils avaient à réaliser et sur la plateforme et son usage. Il y a eu quelques questions sur les bases de données et la recherche sur ces ressources mais pas de questions générales sur les bibliothèques.

Isabelle : certains étudiants, qui n’étaient pas visés par le concept mais intrigués, sont venus vers nous. Après leur avoir expliqué le Bib’truck et leur avoir demandé leur niveau d’études, ils nous ont interrogés sur les ressources en ligne. À ce moment-là on leur a présenté certains services proposés en bibliothèque.

 

Comment avez-vous vécu cette expérience ?

Isabelle : j’ai adoré ! Nous sommes dans un autre rôle, proches des étudiants, à l’extérieur, avec nos sandwichs. On ne va pas dire que c’est la première fois qu’on se retrouve parmi eux mais c’est moins officiel. Et puis le caddie intrigue et amuse du coup les étudiants sont détendus, souriants et même bienveillants.

Virginie : c’est enrichissant. On se sent à l’aise, à leur portée donc le dialogue s’instaure plus facilement. Il n’y a plus de règles, plus de barrières. Ils apprécient qu’on vienne vers eux et qu’on s’intéresse à eux.

Samia : on se libère des contraintes de l’espace de l’institution. Nous sommes dans les mêmes pratiques que les étudiants puisque nous déjeunons à côté d’eux. Il y a une forme de proximité qui se crée. On se rend compte qu’ils nous abordent beaucoup plus facilement. Et puis ils viennent grappiller les informations dont ils ont uniquement besoin. Nous n’avons pas pour mission de délivrer des tartines informationnelles , notre action s’inscrit dans la micro nutrition ! Le retour sur le concept est positif et enrichissant. Ils ont adhéré au concept.

 

Est-ce que selon-vous les bibliothèques doivent multiplier les initiatives pour aller au-devant des étudiants ? Est-ce que Bib’Truck peut être utilisé pour d’autres services ?

Isabelle : je dirais que oui. Il faut sortir de nos bibliothèques et j’espère que d’autres services et d’autres établissements le feront. Mais il faut être conscient que l’on sort de sa zone de confort en faisant ça. Nous ne sommes plus derrière un bureau, dans notre cadre traditionnel. Il faut accepter d’avoir des questions, d’être regardé. Nous demeurons toutefois en représentation mais nous intervenons sur une autre scène !

Virginie : ça a le mérite d’attirer la curiosité et de changer le regard des étudiants sur les bibliothèques. Durant cette expérience, nous avons croisé des collègues qui ont tout de suite adhéré à l’idée et qui vont réfléchir à l’adapter pour des projets.

Samia : c’est un changement d’image que l’on renvoie. Derrière le comptoir d’une bibliothèque d’une institution nous restons dans l’imaginaire collectif sur des représentations stéréotypées qu’il difficile de faire évoluer. Le choix du caddie en Bib’truck et du service proposé hors les murs contribuent à faire évoluer l’image des bibliothécaires par cette touche déjantée  . Qui a dit que les bibliothécaires n’avaient pas d’humour !

Merci Virginie, Isabelle et Samia d’avoir pris le temps de répondre à cet interview et pour le partage d’expérience !

 


Crédit photos : Samia Cahuzac